Zsuzsanna Gécseg: Les degrés de topicalité : analyse pragmatique des phrases à sujet indéfini du français et du hongrois [Degrees of topicality: a pragmatic analysis of sentences with an indefinite subject in French and in Hungarian]. In: Ostium, vol. 19, 2023, no. 2.
Abstract: The paper provides an analysis of sentences with an indefinite subject, based on a parallel corpus of French and Hungarian. Indefinites rarely function as the topic of the sentence. They are considered as bad topics, situated at the periphery of the concept of topicality, whereas definite subjects are the prototypical, central instantiations of the concept. Our purpose is to reveal some factors influencing the degree of topicality of the indefinite subject in these constructions. Given that in Hungarian a (definite or indefinite) subject can occur in three syntactic positions, one of them being reserved to topical constituents, the subject’s position in the Hungarian sentence may indicate that the indefinite subject is topical at a certain degree. On the other hand, the ontology and the thematic role of the subject, as well as the contextual anchoring of the subject’s referent and the semantic content of the predicate have an impact on the topicality of the subject.
Keywords: indefinite subject, prototype, periphery, topicality
Résumé : L’article propose une analyse des phrases avec un sujet indéfini, basée sur un corpus parallèle de français et de hongrois. Les indéfinis fonctionnent rarement comme le sujet de la phrase. Ils sont considérés comme de mauvais sujets, situés à la périphérie du concept de topicalité, alors que les sujets définis sont les instanciations prototypiques et centrales du concept. Notre objectif est de révéler certains facteurs influençant le degré de topicalité du sujet indéfini dans ces constructions. Étant donné qu’en hongrois un sujet (défini ou indéfini) peut se trouver dans trois positions syntaxiques, l’une d’entre elles étant réservée aux constituants topiques, la position du sujet dans la phrase hongroise peut indiquer que le sujet indéfini est topique à un certain degré. D’autre part, l’ontologie et le rôle thématique du sujet, ainsi que l’ancrage contextuel du référent du sujet et le contenu sémantique du prédicat ont un impact sur la topicalité du sujet.
Mots-clés : sujet indéfini, prototype, périphérie, topicalité
0. Introduction
Cette contribution vise à présenter une étude pilote de corpus qui s’inscrit dans le cadre de la théorie du prototype[1]. Cette théorie a été élaborée dans les années 70 par la psychologue Eleanor Rosch et ses collaborateurs[2] qui ont réalisé une série d’expériences afin d’étudier les processus cognitifs de catégorisation qui caractérisent les êtres humains. L’idée de base de Rosch est que l’appartenance à une catégorie donnée est graduelle : il y a des représentants plus centraux d’une catégorie, plus proches du prototype, alors que d’autres éléments sont plus ou moins éloignés du centre de la catégorie. Un exemple cité par Rosch[3]est la catégorie FRUIT : en effet, dans les cultures occidentales, la pomme est souvent considérée comme un fruit qui incarne le prototype des fruits, alors que l’olive est le membre le plus éloigné du centre du concept. Entre les deux extrémités se situent la prune, l’ananas, la fraise et la figue, représentatifs de la catégorie FRUIT en ordre décroissant. Ce caractère graduel de l’appartenance à une catégorie a pour conséquence que certains éléments se situent à cheval entre deux ou plusieurs catégories, aussi les frontières entre les catégories sont-elles floues.
En linguistique, la théorie du prototype est appliquée avant tout en sémantique lexicale (Kleiber)[4]. Elle connaît également des applications en syntaxe, pour décrire certaines classes morphosyntaxiques dans les différentes langues (Croft, Dixon)[5] ou des fonctions grammaticales (Keenan, Comrie, Dowty)[6]. Enfin, il existe des travaux en sémantique de phrase et en pragmatique linguistique qui s’inscrivent dans ce cadre, en particulier des études portant sur les degrés de définitude (Haspelmath)[7].
L’objet de cet article est la catégorie pragmatique appelée topique, une notion clé de la structure informationnelle de l’énoncé. Suivant la définition la plus courante, le rôle pragmatique de topique est associé au référent à propos duquel l’énoncé apporte une nouvelle information.
Les études portant sur le concept de topique et son expression dans les langues naturelles s’accordent pour affirmer que le rôle de topique est typiquement associé au sujet de la phrase, qui est de préférence un GN défini. Face aux sujets définis, un sujet indéfini, s’il peut fonctionner comme topique, reste un topique plus ou moins périphérique par rapport à l’élément central du concept de topicalité.
Notre étude a pour objectif principal de dégager quelques facteurs formels, sémantiques et contextuels qui influencent le degré de topicalité du sujet dans les constructions à sujet indéfini du français, sur la base d’un corpus parallèle français-hongrois.
L’article s’organise comme suit : la section 1 donne un aperçu général des traits associés au topique prototypique. La section 2 est consacrée à l’encodage syntaxique du topique en hongrois, langue discours-configurationnelle. La section 3 présente le corpus parrallèle qui sert de base pour nos analyses, ainsi que la méthode appliquée. Les sections 4-8 analysent cinq facteurs qui ont un effet sur le degré de topicalité d’un sujet indéfini : la position syntaxique du sujet, son ontologie, son rôle sémantique, l’ancrage contextuel du référent du sujet, ainsi que le contenu sémantique du prédicat. La section 8 résume les résultats des analyses.
1. Le prototype du topique
La notion de topique se fonde sur le concept d’à propos. Jeanette Gundel propose de la définir comme suit : « Une entité E est le topique d’une phrase S si et seulement si le locuteur, en utilisant S, cherche à accroître les connaissances de l’allocutaire, demande des informations ou amène l’allocutaire à agir par rapport à E »[8] La phrase (1) illustre cette définition : le locuteur affirme à propos d’un certain groupe d’enfants (ou de la totalité des enfants) qu’ils aiment beaucoup jouer. Le topique de cette phrase correspond donc au sujet de celle-ci, plus précisément à l’ensemble des enfants dénotés par le sujet.
(1) Les enfants aiment beaucoup jouer.
(2) Il y a un chat sous le canapé.
L’information nouvelle que le locuteur cherche à communiquer à propos du topique, appelée commentaire dans la terminologie adoptée ici, est véhiculée par le reste de la phrase. Le commentaire correspond le plus souvent au prédicat de la phrase, comme dans (1).
Le topique n’est pas obligatoirement présent dans une phrase ; certaines constructions peuvent être analysées comme véhiculant une nouvelle information de façon globale, sans impliquer de manière explicite un référent topical. Ainsi, (2) n’affirme pas à propos d’un chat indéterminé qu’il se trouve sous le canapé, mais asserte l’existence – ou plutôt la présence – d’un chat indéterminé à un lieu donné. Sur la base d’une dichotomie établie par Brentano[9] et Marty[10], les phrases pourvues d’une articulation topique-commentaire sont souvent décrites comme des séquences exprimant un jugement catégorique, tandis que les phrases sans topique s’interprêtent comme des jugements thétiques.
Comme nous l’avons vu plus haut, le topique est un concept pragmatique, un rôle discursif qui est associé à une entité (ou un groupe d’entités) ayant une certaine fonction dans la structuration des informations. Cette entité peut être encodée au moyen d’expressions variées, le plus souvent par une expression définie.
De façon similaire aux autres concepts cognitifs, la topicalité d’un référent peut être caractérisée par un ensemble de critères et de propriétés prototypiques. Cette caractérisation concerne entre autres les propriétés des expressions aptes à fonctionner comme topiques. Le critère le plus souvent évoqué est qu’un référent topical doit être individualisé et de préférence connu ou identifiable pour les interlocuteurs. C’est ce qui explique que le rôle du topique est généralement associé à une expression définie[11] (un pronom personnel ou démonstratif, un nom propre ou une description définie). Le critère d’identifiablité est étroitement lié à l’ancrage contextuel ou situationnel de l’entité en question : le référent topical idéal est présent dans la situation de communication ou repérable dans le contexte linguistique au moyen d’une chaîne anaphorique. Ainsi, le sujet de (3) – Isabelle – est plus haut placé sur l’échelle de topicalité que celui de (4) – mon patron –, car l’usage du nom propre suppose que son référent est connu par les interlocuteurs, alors que le référent du GN mon patron n’est identifiable pour l’allocutaire qu’indirectement, via son lien au locuteur. Par ailleurs, le sujet indéfini dans (5) – de jolies fleurs – est un topique très peu idéal pour plusieurs raisons : il s’agit de référents peu individualisés et non identifiables qui appartiennent à la nouvelle information véhiculée par la phrase.
(3) Isabelle écrit une lettre.
(4) Mon patron connaît bien cet entrepreneur.
(5) De jolies fleurs poussent dans son jardin.
Pour des raisons ayant trait à l’organisation optimale des informations, le topique syntaxique se situe généralement au début de l’énoncé. En effet, dans les langues du monde, le topique syntaxique correspond le plus souvent au sujet grammatical[12], placé en position initiale. Dans l’exemple (7) le topique de la phrase est l’expression locative[13] dans cette maison, alors que le sujet est placé après le V. Le rôle discursif du locatif préverbal dans (7) est en fait analogue à celui du sujet cette maison dans (6). Le sujet postverbal Masaryk dans (7) est très éloigné du prototype du topique : il fonctionne comme élément non topical, ayant un statut pragmatique similaire à celui du GPrép de Masaryk dans (6).
(6) Cette maison est le lieu de naissance de Masaryk.
(7) Dans cette maison est né Masaryk.
Nous avons vu que le topique prototypique correspond au sujet grammatical et inversement, le sujet grammatical fonctionne typiquement comme topique. Il en découle que certains traits prototypiques de la fonction du sujet et de la fonction du topique coïncident. Le prototype du sujet, ainsi que celui du topic, désignent un être humain, centre de perspective de l’affirmation, et ont le rôle sémantique d’agent ou d’expérienceur. De ce point de vue, le topique de (3) et celui de (4) sont plus proches du prototype que ceux de (5)-(7), car ils désignent un être humain qui agit (dans (3)) ou fait une expérience cognitive (dans (4)).
2. L’encodage syntaxique du topique en hongrois
Dans les langues « discours-configurationnelles » (É. Kiss 2001), l’organisation syntaxique de la phrase dépend non pas de la fonction grammaticale, mais du statut discursif des constituants : tel est le cas du hongrois. La phrase hongroise se caractérise par une articulation topique-commentaire, où le constituant fonctionnant comme topique se trouve en tête de la phrase, dans la position syntaxique réservée au topique, quelle que soit sa fonction grammaticale. Ainsi, la phrase (8) est une phrase neutre[14] dans laquelle la position du topique est occupée par le complément d’objet Julit.
(8) JulitTop [elütötte egy autó]Comm.
Juli.ACC a renversé une voiture
’Juli a été renversée par une voiture’
(9) [Egy autó áll a ház előtt]Comm.
une voiture se tient la maison devant
’Une voiture est garée devant la maison’
Les expressions nominales intégrées dans le commentaire peuvent apparaître avant ou après le verbe, comme dans (8) et (9). La position du topique n’est pas obligatoirement remplie ; dans (9) le sujet occupe une position préverbale à l’intérieur du commentaire, appelée Modifieur du verbe. En effet, un constituant en tête de la phrase n’apparaît pas nécessairement en position topique. Dans la plupart des cas, ce sont ses traits prosodiques qui permettent de déterminer la position syntaxique et le rôle discursif d’une expression préverbale : le sujet dans (9) est frappé d’un accent de phrase, tandis que le verbe qui le suit est inaccentué. Quant aux expressions topicales comme le complément d’objet dans (8), elles peuvent porter ou non un accent de phrase, mais le verbe qui les suit directement est toujours accentué, indiquant ainsi que c’est la première unité du commentaire[15].
Vu les critères généralement évoqués au sujet du topique syntaxique, on pourrait s’attendre à ce que la position du topique accueille toujours des expressions définies et que les indéfinis en soient exclus. Or, ce n’est pas le cas en hongrois, et c’est notamment la question de la topicalité des indéfinis qui nous intéresse dans cette étude : dans quelle mesure peut-on dire que le sujet egy autó possède quelques traits topicaux dans (10), puisqu’il est en position de topique, mais pas dans (9), où elle est intégrée dans le commentaire ?
(10) [Egy autó]Top elütötte Julit.
une voiture a renversé Juli.ACC
’Une voiture a renversé Juli’
L’idée de base de nos investigations est que les expressions indéfinies sont moins aptes à fonctionner comme topiques que les expressions définies, mais elles ne sont pas pour autant incompatibles avec le rôle de topique. En effet, elles constituent des cas plus ou moins éloignés du du centre du concept de topique. Cela dit, la position du sujet peut servir d’indicateur formel de la frontière qui sépare un sujet topical d’un sujet non topical. Nous partons de l’hypothèse suivante : si le statut pragmatique d’un sujet indéfini occupant la position « topique » est invariablement celui du topique, son degré de topicalité varie selon sa distance des cas plus « centraux », notamment lorsque la position du topique est occupée par un sujet défini.
3. Corpus et méthode
Cette étude se fonde sur un corpus littéraire relevant de la littérature contemporaine : la version originale de L’anomalie de Hervé Le Tellier et sa traduction hongroise. En guise de collecte des données, nous avons sélectionné dans la version française du roman les phrases qui possèdent un sujet indéfini, ainsi que leurs traductions hongroises. Après avoir éliminé les couples de phrases dont l’alignement était problématique, 127 phrases françaises ont été retenues avec leurs traductions. Ce nombre relativement peu élevé montre bien que les expressions indéfinies sont loin d’être des sujets – et des topiques – favorisés. Étant donné que la fréquence d’usage d’une construction est un des indicateurs de son degré de prototypicalité (van der Auwera & Gast)[16], nous attribuons une importance clé à l’occurence statistique de certains types de phrases qui figurent dans notre corpus.
Notons au passage que la traduction hongroise du roman comporte beaucoup plus de phrases à sujet indéfini que la version originale. Ceci s’explique avant tout par le fait qu’un grand nombre de constructions existentielles françaises du type il y a sont traduites en hongrois par des phrases à sujet indéfini. Ces sujets sont intégrés dans le commentaire, placés avant ou après le verbe dans la traduction hongroise (11), alors que le constituant postverbal d’une construction du type il y a du français (12) a la fonction grammaticale de complément, ainsi les constructions de ce type ne figurent pas dans notre corpus.
(11) Vannak új terápiás módszerek?
sont nouveaux thérapeutiques méthodes
(12) Il y a de nouveaux traitements ?
Le corpus ainsi obtenu, il a été soumis à une analyse quantitative à partir d’une série de critères. Étant donné les spécificités syntaxiques de la phrase hongroise, les traductions hongroises peuvent servir de test pour évaluer le caractère topical ou non topical du sujet indéfini des phrases françaises. En particulier, nous examinons les phrases dont la traduction hongroise comporte un sujet placé en position de topique, dont nous assumons qu’il se caractérise par un degré de topicalité relativement élevé. D’un autre côté, nous étudions les cas où la traduction hongroise possède un sujet intégré dans le commentaire (placé avant ou après le verbe), que nous considérons comme ayant un degré de topicalité peu élevé, voire zéro. Ensuite, en nous appuyant sur un certain nombre de facteurs, nous cherchons à établir des degrés à l’intérieur de chacune de ces deux catégories de constructions. Au total, une vingtaine de facteurs ont été pris en considération, comme la position syntaxique du sujet, les propriétés sémantiques du sujet et du prédicat, la présence et la nature d’autres constituants de la phrase, ainsi que les propriétés contextuelles de l’énoncé. Dans ce qui suit, nous allons analyser cinq facteurs qui semblent avoir un effet sur la topicalité du sujet indéfini.
4. La position syntaxique du sujet
Le premier facteur pris en compte est la position syntaxique du sujet. Étant donné que le topique tend à apparaître à la périphérie gauche de la phrase, on assume que les sujets (définis ou indéfinis) préverbaux sont plus aptes à fonctionner comme topiques que les sujets postverbaux. En hongrois un constituant qui apparaît dans le champ préverbal n’occupe pas nécessairement la position du topique, ainsi nous allons opérer une distinction entre un sujet en position du topique, un sujet préverbal intégré dans le commentaire et un sujet postverbal. Dans notre corpus hongrois, la plupart des sujets indéfinis apparaissent à l’intérieur du commentaire (Figure 1), et on en trouve relativement peu qui se trouvent en position de topique, confirmant ainsi l’hypothèse que les sujets indéfinis sont moins aptes à fonctionner comme topiques que les sujets définis.
Figure 1
Quant au corpus français (Figure 2), la quasi-totalité des sujets sont préverbaux, illustrés par (13) et (14).
(13) Un soir, dans un bar, un type, bien saoul, lui dit vouloir en faire tuer un autre.
(14) Un chien traverse la route,
C’est une classe hétérogène sur le plan discursif ; en effet, (13) est traduit en hongrois par une phrase dont le sujet est en position topique (13’), alors que la phrase hongroise correspondant à (14) a un sujet postvebal (14’) :
(13’) Egy kocsmában aztán [egy teljesen elázott fazon]Top azt mondjaV neki, hogy el akar tetetni valakit láb alól.
(14’) eléjük ugrikV egy kutya,
Par ailleurs, nous avons repéré 5 phrases à inversion du sujet dans le corpus français.
Figure 2
Ce sont des cas très éloignés du prototype du topique. Comme le montrent entre autres Fournier (1997), Kampers-Manhe et al. (2004) et Gécseg & Gouesse (2016), la postposition du sujet dans les phrases non-interrogatives relève d’une stratégie de focalisation (ou de « rhématisation », pour reprendre le terme employé par Fournier). Ainsi, le sujet postverbal de la phrase (15), tirée du corpus, a un rôle discursif analogue à celui du constituant postverbal des constructions existentielles du type il y a – il introduit de nouveaux référents dans le discours, au moyen d’une localisation spatiale :
(15) Près des immenses portes coulissantes se découpent, minuscules, trois silhouettes.
(15’) Près des immenses portes coulissantes il y a trois minuscules silhouettes.
5. L’ontologie du sujet
Il est généralement admis que les expressions dénotant des animés, en particulier des êtres humains sont plus adaptés au rôle de topique – et, par conséquent, à la fonction de sujet – que les expressions dont le référent est un objet non animé. Cela s’explique par le fait que les êtres humains sont plus aisément représentés comme des êtres autonomes, ayant une identité aux contours nets, distincte de leur entourage. Dans notre corpus, les sujets dénotant un être animé et ceux qui désignent un objet non-animé (un objet concret, un événement, une émotion ou une sensation) sont représentés dans une proportion quasi-égale, avec 54 pour cents de sujets animés (Fig. 3).
Figure 3
En ce qui concerne le rapport entre l’ontologie du sujet et sa position syntaxique dans le corpus hongrois, la grande majorité des sujets en position topique désignent un être humain (16), alors que la plupart des sujets intégrés dans le commentaire ont le trait [-animé] (17).
(16) Dans la pénombre du petit matin, un homme au visage anguleux pousse en silence une porte de chambre,
(17) Un silence s’installe, solide comme de la brique.
(18) Une balle a traversé la vitre de la portière arrière gauche,
(19) une femme y dort.
Figure 4
Par ailleurs, comme le montrent les diagrammes de la Figure 4, un sujet [-animé] peut aussi présenter des traits de topicalité. Un tel cas est illustré par l’exemple (18), dont la traduction hongroise contient un sujet placé en position topique. D’un autre côté, le sujet [+humain] de (19) fait partie du commentaire dans la version hongroise, il est donc non topical, face au sujet [-animé] de (18). Ces différences suggèrent que le critère portant sur l’ontologie du sujet, malgré la dominance des sujets [+humain] en position topique, n’est pas une condition suffisante pour en déterminer le degré de topicalité.
5. Le rôle sémantique du sujet
On peut relever un rapport naturel entre le rôle sémantique du sujet et son ontologie ; en effet, le rôle d’agent et celui du sujet d’expérience sont le plus souvent associés aux être animés capables d’agir ou de faire une expérience cognitive ou affective. Les expressions dénotant des êtres animés et qui se voient attribuer le rôle d’agent sont très haut placées sur les échelles de topicalité. Dans notre corpus hongrois, un peu plus de la moitié des sujets en position topique ont le rôle sémantique d’agent (Figure 5). Tous les sujets agentifs de ce groupe ont le trait [+animé humain], comme celui de l’exemple (20).
Toujours dans le groupe topique, un relativement grand nombre de sujets ont le rôle de patient ; près de la moitié de ces derniers ont le trait [-animé]. Ce cas de figure est illustré par l’exemple (21).
Figure 5
(20) Deux jours plus tard, un collègue inquiet avertira la police,
(21) Certaines images, postées sur les réseaux sociaux, sont rapidement devenues inaccessibles.
(22) Une dame entre,
(23) Des mouvements importants ont été observés depuis.
Quant aux sujets intégrés dans le commentaire dans les traductions hongroises, seul un tiers est agentif (22), et la grande majorité des sujets reçoivent de leur verbe le rôle de patient (23). 74 pour cents des sujets agents dénotent un être animé humain, alors que cette proportion n’est que de 15 pour cents dans le cas des sujets patients.
6. Le statut cognitif du sujet
Une des conditions souvent évoquées au sujet d’un référent topical est qu’il doit être identifiable indépendamment de la prédication portant sur ce référent. L’identification du référent d’une expression peut passer par des voies variées : par le contexte discursif, la situation ou les connaissances d’arrière-plan partagées par les interlocuteurs.
La différence sémantique fondamentale qui sépare les expressions définies et indéfinies est que les premières dénotent des référents « connus » ou « identifiables », ce qui les rend particulièrement aptes à assumer le rôle du topique dans un énoncé catégorique. D’un autre côté, si les expressions indéfinies non génériques semblent partager la propriété sémantique de référer à des individus ou objets « inconnus », « non identifiables », le contexte discursif permet parfois d’identifier ces référents à un certain degré. L’ancrage contextuel d’un référent peut se réaliser de plusieurs manières ; ainsi, on distingue indéfinis partitifs et indéfinis existentiels (ou lecture partitive et lecture existentielle des indéfinis)[17], où la partitivité suppose l’existence d’un ensemble de référents connus dont l’indéfini en question désigne un membre ou un sous-groupe indéterminé. L’exemple (24) décrit une scène dont les personnages sont les passagers d’un avion : le sujet certains passagers, un indéfini partitif, désigne un sous-groupe de ces passagers déjà présents dans le contexte.
Un même indéfini peut avoir une lecture partitive ou une lecture existentielle, en fonction du contexte. Dans (25), le GN un soldat pourrait désigner un individu n’ayant aucun lien avec le contexte précédent, mais cet exemple particulier décrit une scène qui se joue sur une base militaire, où un groupe de soldats sont en train de préparer une réunion de travail. Dans ce contexte, le GN un soldat a une lecture partitive, il est donc sémantiquement équivalent à l’expression partitive l’un des soldats.
Enfin, l’identifiabilité d’un référent peut être assurée, quoiqu’à un moindre degré, par son caractère prévisible dans une situation particulière. La deuxième phrase dans (26) a pour sujet le GN une hôtesse, et la scène se passe dans un avion. Bien que le référent du sujet indéfini soit nouvellement introduit dans le discours, la présence d’une hôtesse dans cette situation est prévisible, voire stéréotypique.
(24) certains passagers tentent de se reposer sur les matelas installés sous les toiles,
(25) Les canapés, les tableaux interactifs sont installés, un soldat branche la machine à expressos.
(26) mais tandis que l’avion se vide, Miesel demeure assis sur son siège, près du hublot. Une hôtesse lui tapote l’épaule,
(27) Jeudi en début de soirée, un Boeing 787 d’Air France a été contraint de se poser sur la base aérienne militaire de McGuire, située dans le New Jersey.
La majorité des sujets indéfinis de notre corpus ont des référents dépourvus d’ancrage contextuel. Beaucoup d’entre eux figurent dans l’énoncé initial d’un chapitre du roman. Tel est l’exemple (27), qui est la première phrase d’un compte rendu sur l’atterrissage d’un avion civil sur une base militaire.
Figure 6
La Figure (6) montre que dans le corpus hongrois la plupart des sujets indéfinis en position topique ont un référent ancré dans le contexte, comme dans les exemples (24)-(26). Quant aux sujets intégrés dans le commentaire, la grande majorité de ces sujets indéfinis désignent un référent entièrement nouveau, ce qui indique leur caractère non topical, comme dans (27).
7. Le contenu sémantique du prédicat
Le dernier facteur que nous analysons ici concerne le sémantisme du prédicat. Dans notre corpus, les verbes présentent une grande variété de contenus sémantiques : on trouve des verbes exprimant divers types d’actions, des verbes de mouvement, des verbes dénotant une position ou une posture, une sensation sonore ou visuelle, des verbes psychologiques etc. À l’intérieur de cet ensemble hétérogène, on peut distinguer deux classes sémantiques majeures : d’un côté, des prédicats pourvus d’un sémantisme spécifique, typiquement consitués d’un verbe transitif et de son complément, et d’un autre côté, des prédicats exprimant l’entrée sur scène, l’apparition, ou la présence d’un individu à un lieu donné. Le premier groupe de prédicats est illustré par les exemples (28) et (29), dont le prédicat se fonde sur les verbes agentifs pousser et tricher.
(28) Dans la pénombre du petit matin, un homme au visage anguleux pousse en silence une porte de chambre,
(29) Mais un sous-traitant indien a triché sur la qualité du béton des fondations,
(30) Une dame entre,
(31) Des mouvements très importants ont été observés depuis.
Dans le second groupe, on trouve surtout des verbes de mouvement comme voler, tomber (dans le sens de ‘arriver’), se poser, traverser, des verbes de posture comme se tenir, être assis, des verbes de sensation visuelle ou sonore comme scintiller ou chuinter. Comme on peut le voir dans (30) et (31), ces prédicats ont pour fonction dominante non pas d’asserter quelque chose à propos d’une entité, mais d’introduire un nouveau référent dans le discours.
Un peu plus de la moitié des énoncés de notre corpus comportent un prédicat qui appartient à cette dernière catégorie. Quant à leur distribution, on observe une corrélation forte entre un sujet placé en position topique dans le corpus hongrois et un prédicat pourvu d’un contenu sémantique spécifique et riche, illustrée par (28)-(29). Par ailleurs, une tendance également très nette se dégage pour les sujets intégrés au commentaire à se combiner avec un prédicat appartenant à la seconde catégorie, illustrée par (30)-(31) (Figure 7).
Figure 7
Notre corpus confirme ainsi l’observation de Carlier (2005) que les prédicats dénotant l’entrée en situation d’une entité ou la présence d’une entité dans une situation apparaissent typiquement dans les énoncés thétiques, i.e. les énoncés sans topique : dans ces énoncés, l’identification du référent du sujet ne se fait pas indépendamment de la prédication, mais c’est la prédication elle-même qui permet de poser l’existence de ce référent.
Conclusion
Dans cette étude, nous avons examiné quelques facteurs susceptibles d’influencer le degré de topicalité d’un sujet indéfini. Les analyses quantitatives du corpus parallèle français-hongrois montrent que les sujets indéfinis les plus proches du centre du concept de topicalité partagent les traits suivants : ils occupent la position canonique préverbale dans une phrase française et la position topique en hongrois, ils désignent un être animé humain, ils dénotent un référent ancré dans le contexte, et ils sont associés à un prédicat pourvu d’un contenu sémantique spécifique et riche, dénotant une action faite par le référent du sujet. Presque la totalité de ces sujets sont en position topique dans la traduction hongroise du roman. L’exemple (32) illustre ce cas de figure. Le sujet un des auxiliaires afghans désigne un membre d’un groupe d’individus déjà introduits dans le monde du récit ; l’autonomie référentielle de cet individu est assurée non seulement par la structure partitive un des X, mais aussi par l’apposition un type du nettoiement qui complète la description du personnage en question. D’un autre côté, le prédicat de la phrase décrit un acte spécifique et non stéréotypique de ce personnage, en précisant les circonstances de cet acte. Enfin, la proposition subordonnée gérondive qui reprend implicitement le sujet de la phrase assure la continuité du topique.
(32) La veille, un des auxiliaires afghans, un type du nettoiement, s’était fait exploser avec une ceinture près du réfectoire, en hurlant Allahou Akbar,
(33) Peu avant vingt-trois heures, dans l’angle nord du hangar s’élève un tourbillon de fumée grise, simple volute d’abord, mais qui vire au noir et se densifie.
(34) Un homme plus jeune, grand, brun, cheveux courts, lui tient compagnie.
(35) Une longue limousine rose bonbon s’arrête devant le pavillon.
Les autres combinaisons de traits éloignent graduellement le sujet indéfini du centre de la topicalité, et certaines combinaisons le situent déjà dans la zone du non topical. Le cas le plus éloigné du prototype du topique, illustré par (33), a un sujet postverbal dans la version française et intégré au commentaire dans la version hongroise. Le sujet réfère à un phénomène naturel, et le prédicat exprime l’apparition de ce phénomène à un lieu déterminé. L’inversion du sujet est déclenchée par la présence d’un complément locatif dont la présence est obligatoire dans la phrase : c’est le locatif qui assure l’ancrage du référent du sujet indéfini dans la situation, étant donné que ce référent n’a pas l’autonomie nécessaire pour fonctionner comme topique[18]. On a donc affaire ici à un sujet si éloigné du prototype du topique qu’il se qualifie comme non topical.
Entre les deux extrémités présentées ci-dessus se situent toute une série de cas intermédiaires où des traits de topicalité sont présents en nombre varié et se mélangent avec d’autres traits qui éloignent le sujet indéfini du centre du concept de topicalité. Ainsi, les sujets dans (34) et (35) partagent le trait non topical de dénoter un référent non ancré dans le contexte, mais celui de (34) a un degré de topicalité plus élevée que (35), car il s’agit d’un référent humain qui agit. Quant aux prédicats de ces deux phrases, celui de (34) comporte un verbe légèrement agentif, mais au sémantisme pauvre, correspondant à une localisation spatiale. Le prédicat de (35) exprime une entrée en situation, et contribue ainsi à introduire un nouveau référent dans le discours.
Si les spécificités structurales de la phrase hongroise peuvent constituer un outil syntaxique afin d’évaluer la topicalité du sujet dans l’équivalente française, l’opposition binaire entre position topique et position intégrée au commentaire s’avère insuffisante pour établir des distinctions plus fines en termes de degrés de proximité ou d’éloignement par rapport au prototype. Une étude plus approfondie des facteurs dégagés dans cette étude, fondée sur un corpus plus vaste, pourra contribuer à une meilleure connaissance de ces facteurs et des rapports de dominance de ceux-ci.
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N o t e s
[1] Pour un aperçu des différentes versions de la théorie du prototype, voir KLEIBER, G.: La sémantique du prototype: catégories et le sens lexical. Paris: PUF 1990; et VAN DER AUWERA, J. – GAST, V.: Categories and prototypes. In: SONG, J. (éd.): The Oxford Handbook of Typology. Oxford: Blackwell 2010, p. 166–189. Notre étude se fonde sur la version dite « standard » de la théorie.
[2] ROSCH, E.: On the internal structure of Perceptual and Semantic Categories. In: MOORE, T. E. (éd.): Cognitive Development and the Acquisition of Language. New York: Academic Press 1973, p. 111–144. ROSCH, E.: Human categorization. In: WARREN, N. (éd.): Advances in Cross-Cultural Psychology, vol. 1, London: Academic Press 1977, p. 1–49.
[3] ROSCH, E.: On the internal structure of Perceptual and Semantic Categories. In: MOORE, T. E. (éd.): Cognitive Development and the Acquisition of Language. New York: Academic Press 1973, p. 111–144.
[4] KLEIBER, G.: La sémantique du prototype: catégories et le sens lexical. Paris: PUF 1990.
[5] CROFT, W.: Typology and universals. Cambridge: Cambridge University Press 2003. DIXON, R. M. W.: Where have all the adjectives gone?. In: Studies in Language, vol. 1, 1977, p. 19–80.
[6] KEENAN, E.: Towards a universal definition of „subjects”. In: LI, C. (éd.): Subject and Topic. New York: Academic Press 1976, p. 303–333. COMRIE, B.: Language universals and linguistic typology. Chicago: University of Chicago Press 1989. DOWTY, D.: Thematic proto-roles and argument selection. In: Language, vol. 67, 1991, p. 547–619.
[7] HASPELMATH, M.: Indefinite pronouns. Oxford: Oxford University Press 1997.
[8] GUNDEL, J.: Universals of topic-comment structure. In: HAMMOND, M. – MORAVCSIK, E. – WIRTH, J. (éds.): Studies in Syntactic Typology. In: Typological Studies in Language, vol. 17, Amsterdam: John Benjamins 1988, p. 210: « An entity, E, is the topic of a sentence, S, iff in using S the speaker intends to increase the addressee’s knowledge about, request information about, or otherwise get the addressee to act with respect to E. »
[9] BRENTANO, F.: Psychology from an empirical point of view. [Traduit par RANCURELLO, A. C. – TERRELL, D. B. – McALISTER, L. de Psychologie vom empirischen Standpunkt (1874)]. London: Routledge 1924.
[10] MARTY, A.: Gesammelte Schriften. Halle: Max Niemeyer Verlag 1918.
[11] En russe, l’antéposition du topique n’est possible que pour les expressions définies; de même, seul un GN défini peut être disloqué en français parlé (LAMBRECHT, K.: Information structure and sentence form: Topic, focus and the mental representation of discourse referents. Cambridge: Cambridge University Press 1994). En japonais, le marqueur wa, souvent analysé comme un marqueur de topique, accompagne exclusivement une expression interprétée comme définie.
[12] Selon Comrie (COMRIE, B.: Language universals and linguistic typology. Chicago: University of Chicago Press 1989), la fonction sujet n’est autre que la grammaticalisation du rôle de topique.
[13] Les topiques correspondant à une localisation spatiale ou temporelle sont appelées topiques scéniques (v. entre autres ERTESCHIK-SHIR, N.: The dynamics of focus structure. Cambridge: Cambridge University Press 1997 et et LAHOUSSE, K.: NO-Subject inversion in French and (preposed) adverbs. In: PÉREZ-LEROUX, A.T. – ROBERGE, Y. (éds.): Romance linguistics: Theory and acquisition. Selected papers from the 32nd Linguistic Symposium on Romance Languages (LSRL), Toronto, April 2002. Amsterdam & Philadelphia: John Benjamins 2003, p. 181–196).
[14] Nous entendons par phrase neutre une phrase qui ne comporte pas de constituant focalisé: KÁLMÁN, L. (1985): Word order in neutral sentences. In: KENESEI, I. (éd.): Approaches to Hungarian vol. 1.Data and descriptions. Szeged: JATE Press 1985, p. 13–23; et PUSKÁS, G.: Word Order in Hungarian: The Syntax of A’-Positions. Amsterdam & Philadelphia: John Benjamins 2000.
[15] Pour les critères formels permettant d’identifier la frontière entre le topique et le commentaire dans la phrase hongroise, voir entre autres KISS, K. É.: The syntax of Hungarian. Cambridge: Cambridge University Press 2002.
[16] VAN DER AUWERA, J. – GAST, V.: Categories and prototypes. In: SONG, J. (éd.): The Oxford Handbook of Typology. Oxford: Blackwell 2010, p. 166–189.
[17] Sur la distinction entre interprétation partitive et interprétation existentielle des indéfinis, voir entre autres MILNER, J-Cl.: De la syntaxe à l’interprétation. Quantités, insultes, exclamations. Paris: Éditions du Seuil 1978 ; et BOSVELD-DE-SMET, L.: Indéfinis, quantificateurs généralisés, lecture existentielle et lecture non-existentielle. In : Faits de langue, vol. 4, 1994, p. 129–137.
[18] Sur le rôle des locatifs pour assurer l’autonomie référentielle d’un indéfini, voir CARLIER, A.: L’argument davidsonien: un critère de distinction entre les prédicats « stage level » et les prédicats « individual level » ?. In: Travaux de linguistique, vol. 50, 2005, p. 13–35 ; et GÉCSEG, ZS. – SARDA, L.: On a continuum from categorical to thetic judgment: Indefinite subjects and locatives in Hungarian and French. In: SARDA, L. – LENA, L. (éds.): Existential constructions across languages: Forms, meanings and functions. Amsterdam: John Benjamins, à paraître.
Zsuzsanna Gécseg
Université de Szeged
gecseg.zsuzsanna@gmail.com